samedi 11 février 2012
La carrière du pancratiaste Markos Aurèlios Dèmostratos
Par Strasser Jean-Yves. La carrière du pancratiaste Markos Aurèlios Dèmostratos Damas. In: Bulletin de correspondance.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_2003_num_127_1_7129
L'éditeur du site « PERSEE » est le Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, Direction de l'enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.
Les athlètes qui excellent à la fois dans le pancrace et la boxe sont rares, alors qu'il est fréquent de voir des pancratiastes remporter l'épreuve de la lutte et inversement. Il y a d'autant moins de vainqueurs doubles boxe-pancrace qu'on avance dans le temps et qu'on monte dans la hiérarchie des concours. Ainsi, le boxeur Aurèlios Septimios Eirènaios a été vainqueur au pancrace dans des concours à prix d'argent, à Kition et à Hiérapolis de Syrie, mais il n'a jamais remporté que la boxe dans les concours sacrés. Un immense athlète comme Dèmokratès de Magnésie du Méandre, boxeur périodonique, n'a remporté le pancrace que dans sa patrie et au concours du koinon de Lycie ; sans doute ne se serait-il même pas présenté dans l'épreuve à Élis ou à Delphes devant les meilleurs de cette discipline. Même T. Phlavios Archibios, l'un des prédécesseurs de Markos Aurèlios Dèmostratos Damas de Sardis au sommet de la hiérarchie des pancratiastes, n'a remporté la boxe qu'à deux reprises, aux Balbilleia d'Éphèse et à Antioche, mais dans aucun concours majeur. Pour l'époque impériale, citons encore, sans souci d'exhaustivité mais en nous limitant aux plus grands athlètes, un pancratiaste, Pergamos, vainqueur πυγμήν παγκράτιον à Nicomédie, et un certain Rouphos, qui, au IIe/llle siècle apr. J.-C, a exercé les trois sports dits « lourds ». Aux époques hellénistique et classique, les exemples n'abondent pas non plus. Mis à part un cas incertain de double vainqueur aux Pythia — et encore, ce serait parmi les enfants, où la concurrence doit être moins rude — et Astyanax de Milet, dont nous ne connaissons pas le palmarès exact, on ne trouve guère que trois très grands athlètes vainqueurs dans un concours de la période au pancrace et à la boxe : dans le dernier quart du IIIe ou le premier quart du IIe siècle av. J.-C, Kallistratos de Sicyone excelle vraiment dans les deux disciplines, remportant par exemple les deux dans une même célébration des Nemea ; il n'est néanmoins ni périodonique ni même olympionique. Sans doute un peu avant lui, Kleitomachos de Thèbes est olympionique dans les deux épreuves, lors de deux célébrations différentes. Et surtout, toute l'Antiquité a en mémoire les exploits de Théogène de Thasos, vainqueur des Olympia dans la boxe en 480, dans le pancrace quatre ans plus tard. À l'époque impériale, seul Dèmostratos Damas, qui ne peut cependant pas s'enorgueillir d'une victoire olympique dans la boxe, peut rivaliser avec ces vieilles gloires du sport, grâce à ses trois victoires dans les concours de la période, aux Pythia, aux Isthmia et aux Nemea. Son palmarès dans la boxe est d'autant plus remarquable que presque toutes les victoires ont été acquises dans des concours majeurs ; Dèmostratos n'en compte semble-t-il aucune à son actif dans les concours à prix d'argent, où il s'est cantonné à sa discipline favorite, le pancrace, bien que les occasions de remporter la boxe avaient certainement dû se présenter dans ces agônes où la concurrence peut être moins grande. Au contraire, Damas a seulement affronté l'élite de la discipline dans les concours de la période.
La raison de la rareté des athlètes excellant à la fois dans le pancrace et la boxe est double. Ce sont deux disciplines qui réclament des capacités physiques et techniques assez différentes, au contraire du pancrace et de la lutte, aux exigences très proches. La seconde explication est, à certains égards, encore plus importante. Lors des concours, l'ordre traditionnel des sports de combat est le suivant : lutte, boxe et enfin pancrace. Or la seconde discipline est particulièrement traumatisante, et il est rare que même le vainqueur sorte indemne de la compétition : il lui est donc impossible à ce moment d'enchaîner avec le pancrace. C'est ce qu'illustre l'anecdote relative à Kleitomachos de Thèbes ; celui-ci ambitionnait les couronnes olympiques dans le pancrace et la boxe ; son rival Kapros d'Elis participait à la lutte et au pancrace. Après la victoire de Kapros à la lutte, Kleitomachos demande aux hellanodices d'inverser l'ordre des épreuves, afin de pouvoir affronter Kapros dans un premier temps au pancrace, avant d'avoir reçu les blessures inhérentes à la boxe (πριν ή πυκτεύσαντα αυτόν λαβείντραύματα) ; ayant obtenu gain de cause, Kleitomachos perd contre Kapros dans le pancrace, mais peut encore participer à la boxe en pleine possession de ses moyens.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_2003_num_127_1_7129
L'éditeur du site « PERSEE » est le Ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche, Direction de l'enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.
Les athlètes qui excellent à la fois dans le pancrace et la boxe sont rares, alors qu'il est fréquent de voir des pancratiastes remporter l'épreuve de la lutte et inversement. Il y a d'autant moins de vainqueurs doubles boxe-pancrace qu'on avance dans le temps et qu'on monte dans la hiérarchie des concours. Ainsi, le boxeur Aurèlios Septimios Eirènaios a été vainqueur au pancrace dans des concours à prix d'argent, à Kition et à Hiérapolis de Syrie, mais il n'a jamais remporté que la boxe dans les concours sacrés. Un immense athlète comme Dèmokratès de Magnésie du Méandre, boxeur périodonique, n'a remporté le pancrace que dans sa patrie et au concours du koinon de Lycie ; sans doute ne se serait-il même pas présenté dans l'épreuve à Élis ou à Delphes devant les meilleurs de cette discipline. Même T. Phlavios Archibios, l'un des prédécesseurs de Markos Aurèlios Dèmostratos Damas de Sardis au sommet de la hiérarchie des pancratiastes, n'a remporté la boxe qu'à deux reprises, aux Balbilleia d'Éphèse et à Antioche, mais dans aucun concours majeur. Pour l'époque impériale, citons encore, sans souci d'exhaustivité mais en nous limitant aux plus grands athlètes, un pancratiaste, Pergamos, vainqueur πυγμήν παγκράτιον à Nicomédie, et un certain Rouphos, qui, au IIe/llle siècle apr. J.-C, a exercé les trois sports dits « lourds ». Aux époques hellénistique et classique, les exemples n'abondent pas non plus. Mis à part un cas incertain de double vainqueur aux Pythia — et encore, ce serait parmi les enfants, où la concurrence doit être moins rude — et Astyanax de Milet, dont nous ne connaissons pas le palmarès exact, on ne trouve guère que trois très grands athlètes vainqueurs dans un concours de la période au pancrace et à la boxe : dans le dernier quart du IIIe ou le premier quart du IIe siècle av. J.-C, Kallistratos de Sicyone excelle vraiment dans les deux disciplines, remportant par exemple les deux dans une même célébration des Nemea ; il n'est néanmoins ni périodonique ni même olympionique. Sans doute un peu avant lui, Kleitomachos de Thèbes est olympionique dans les deux épreuves, lors de deux célébrations différentes. Et surtout, toute l'Antiquité a en mémoire les exploits de Théogène de Thasos, vainqueur des Olympia dans la boxe en 480, dans le pancrace quatre ans plus tard. À l'époque impériale, seul Dèmostratos Damas, qui ne peut cependant pas s'enorgueillir d'une victoire olympique dans la boxe, peut rivaliser avec ces vieilles gloires du sport, grâce à ses trois victoires dans les concours de la période, aux Pythia, aux Isthmia et aux Nemea. Son palmarès dans la boxe est d'autant plus remarquable que presque toutes les victoires ont été acquises dans des concours majeurs ; Dèmostratos n'en compte semble-t-il aucune à son actif dans les concours à prix d'argent, où il s'est cantonné à sa discipline favorite, le pancrace, bien que les occasions de remporter la boxe avaient certainement dû se présenter dans ces agônes où la concurrence peut être moins grande. Au contraire, Damas a seulement affronté l'élite de la discipline dans les concours de la période.
La raison de la rareté des athlètes excellant à la fois dans le pancrace et la boxe est double. Ce sont deux disciplines qui réclament des capacités physiques et techniques assez différentes, au contraire du pancrace et de la lutte, aux exigences très proches. La seconde explication est, à certains égards, encore plus importante. Lors des concours, l'ordre traditionnel des sports de combat est le suivant : lutte, boxe et enfin pancrace. Or la seconde discipline est particulièrement traumatisante, et il est rare que même le vainqueur sorte indemne de la compétition : il lui est donc impossible à ce moment d'enchaîner avec le pancrace. C'est ce qu'illustre l'anecdote relative à Kleitomachos de Thèbes ; celui-ci ambitionnait les couronnes olympiques dans le pancrace et la boxe ; son rival Kapros d'Elis participait à la lutte et au pancrace. Après la victoire de Kapros à la lutte, Kleitomachos demande aux hellanodices d'inverser l'ordre des épreuves, afin de pouvoir affronter Kapros dans un premier temps au pancrace, avant d'avoir reçu les blessures inhérentes à la boxe (πριν ή πυκτεύσαντα αυτόν λαβείντραύματα) ; ayant obtenu gain de cause, Kleitomachos perd contre Kapros dans le pancrace, mais peut encore participer à la boxe en pleine possession de ses moyens.
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